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Les Zefaquiens
28 mai 2013

Le bus, par Caroline

CHAPITRE 1:


DANIELLE


En montant dans le bus, je fais un sourire au conducteur.  Je suis
épuisée d’avoir couru pour rattraper le bus 24.  Le bus 35, celui que
je prends tous les jours, je l’ai raté.  Je suis en retard donc je
dois prendre un autre bus, le bus 24.  Le conducteur me salue, je
paye, et je m’assois.


Je vais être en retard pour mon interview.  Je suis toujours en
retard.  On me dit que je ne sais pas organiser mon temps, cela est
vrai.  Je n’ai presque plus d’argent.  Étant artiste, on ne gagne pas
beaucoup de sous.  Mon interview est située au Musée de l'art
contemporain.  Je veux que mon art soit vu par tout le monde.  Mes
sculptures sont toujours abstraites et difficiles à comprendre mais
elles symbolisent une grande partie de ma vie.  J’ai du mal à trouver
un boulot qui accepte mon art.  Presque personne ne me comprend.  Mon
coeur a été brisé tellement de fois.  On me laisse toujours derrière
avec tous les problèmes.  Je suis seule, à tout réparer.  La seule
chose qui me reste, est mon art.


Je suis enceinte, encore une fois.  A l'âge de 15 ans, je suis tombée
enceinte pour la première fois.  Je n'osais pas le dire à mes parents,
j'avais peur qu'ils ne me parlent plus.  J'avais raison.  Après qu'ils
ont découvert cela, ils ne voulaient rien avoir à faire avec moi.
J'ai dû vivre chez ma meilleure amie qui déménagea un an plus tard.
J'ai décidé d'avoir l'enfant et de l'abandonner car je savais que je
ne pourrais pas vivre avec un enfant à mon âge.  Mon amoureux, Paul,
était un joueur de foot.  Il savait tellement bien jouer qu’on était
sûr qu’il allait reçevoir une bourse pour l’université.  On allait
déménager ensemble et il allait devenir célèbre.  Mais quand il apprit
la nouvelle, il me laissa toute seule car il ne voulait pas faire
partie de tout ce drame et il ne voulait pas m'aider avec tout ce qui
se passait.  Il pensait qu’il serait réputé pour avoir eu un enfant à
l’âge de 15 ans et ne voulait pas risquer sa carrière pour moi.  Il
m'aimait pas vraiment.  J'était juste une fille avec qui il était
sorti , une des nombreuses filles.  Après avoir donné mon fils à
adopter, je regrettai cette journée pendant le reste de ma vie.  J'ai
abandonné mon fils à un couple que je ne connaissais presque pas.
J'attends une fille cette fois.  Mon amant est parti comme tous les
autres.  Il ne voulait rien de sérieux après quatre ans et quand je
lui ai dit que j’étais tombée enceinte, il me répondit que c’était
l’enfant ou lui.  Je savais qu'il allait bientôt me quitter et que
cela était juste une des excuses qu'il avait inventées pour me
laisser.



CHAPITRE 2:


AURALIE


Je rentre dans le bus avec Julien à mon côté.  Il m'énerve.  Il passe
son temps à jouer au foot et il n'a jamais le temps d' aller voir un
film avec moi, ou sortir dinner.  J'ai l'impression qu'il me met de
côté et ne veut plus qu'on soit ensemble.  Je lui fait la tête car il
ne fait plus de plans avec moi.  Julien paye son billet après que je
paye le mien.  Le conducteur regarde devant lui.  Après l'école,
chaque jour, je regarde le conducteur et il ne me regarde jamais droit
dans les yeux.  Je me demande s'il a peur de moi, ou bien s'il ne me
trouve pas assez jolie pour mériter son regard.



Aujourd'hui en général, n'a pas été une très bonne journée.  Nous
avons reçu nos contrôles de math de la semaine dernière ce matin.
J'ai bien révisé toutes les nuits pendant quatre heures. C’était un
contrôle important, mais je n'ai  reçu qu’un 12.  Dans ma classe de
maths, je suis la première, mais le professeur, lui, il ne m'aime pas.
 Je ne sais pas pourquoi, mais chaque fois que je lui fais un sourrire
il secoue sa tête et roule ses yeux.  A Noël, je lui ai offert un
cadeau et il ne m’a même pas remerciée, mais a pris mon cadeau et l’a
mis juste au dessus de tous ses papiers.  A la fin de la journée, il a
pris mon cadeau chez lui avec tous les autres qu'il a reçus.  Le jour
d’après, il a rapporté des lettres de remerciement pour chaque élève
qui lui avait offert un paquet ou une lettre, sauf moi.  Il m'a passée
sans rien dire.  Depuis ce jour je fait tout pour qu'il ne me déteste
pas.



Mes parents sont très sévères.  Je sais qu'ils vont me priver de
sortie pendant quelques semaines. Ils n'étaient pas comme ça avant.
Je suppose que c'est après l'accident de train qui m'est arrivé il y a
3 ans.  Mes parents veulent juste me protéger du monde maintenant.  En
plus, je suis enfant unique.  Depuis, chaque fois que je sors avec des
amis, ils me demandent de les appeler à chaque heure.  Personne ne
sait que j'étais dans un accident de voiture sauf ma meilleure amie.
Émilie et moi, on se connait depuis qu'on est en 6ème.  On était dans
le même groupe académique.  On ne se sépare jamais l'une de l'autre et
on se raconte tout.  Comme je n'ai pas de soeur ni de frère, c'est la
personne la plus proche que j'ai.  Je la considère de la famille.



Dès que je sors du bus je vais appeler Émilie.  Je vais lui racconter
tout ce qui se passe avec Julien.  A cet instant, il essaye de me
tenir la main, mais je la mets dans ma poche à l'instant même.  Je
sais qu'il fait des efforts, mais je ne suis pas dans l’humeur de lui
parler maintenant.  Je sens son regard, mais je ne le croise pas.  Je
ne fais que de regarder devant moi.  Je sais que cela lui fait mal,
que je l'ignore.  Ça se voit qu'il se sent comme si je venais de lui
donner un coup de poing à l'estomac.



CHAPITRE 3:


JULIEN


Les portes du bus s'ouvrent et Auralie et moi rentrons. Auralie, ma
copine, a l'air d'être énervée. Elle paye son billet puis je paye le
mien. Après qu'elle paye elle se dépêche de prendre un siège, elle ne
m'attend pas. Je prends mon billet aussi vite que je peux, et je cours
 un petit peu pour la rattraper.


J’ai vraiment des problèmes là. C’est pas possible. Auralie ne veut
même pas me regarder, et en ce moment, c’est pas la fête chez moi non
plus. Déja, ma mère semble m’éviter, commme si il y avait un secret
qu’elle voulait me cacher. Par exemple, si j’avais un frère jumeau et
qu’il avait disparu, comme dans les films. Ou que j’étais adopté. Un
truc ultra excitant! Mais non, rien de très intéressant se passe dans
ma vie. Peut être que c’est parce que je suis tellement occupé avec ma
famille que je ne passe pas autant de temps avec Auralie. Je pense
qu’elle m’évite peut être à cause de ça. A mon avis elle se sent
isolée. Faudrait que je fasse quelque chose, que je l’emmène dinner,
faire du bowling, aux Champs Elysés. Quelque chose d’intéresssant où
elle sentirait que je veux vraiment être avec elle. J’essaye de
glisser ma main dans la sienne, mais au même moment, elle met sa main
dans sa poche. Ça doit être ca. Elle a l’impression qu’on ne passe
plus assez de temps ensemble.


En plus, c’est pas facile avec mon père aussi, il ne me parle pas
beaucoup, il est toujours occupé avec son boulot à la boulangerie.


Mes parents sont très différents de moi; non seulement physiquement,
eux, ils ont la peau claire, les yeux bleu et vert, et les cheveux à
l’origine très blonds. Moi, avec ma peau mate, les cheveux crépus
noirs, c’est complètement l’opposé. On dirait vraiment pas qu’on a
quoi que ce soit en commun. Peut être que ma théorie de film est
vraie; je pourrais être adopté. Mais je rejette l’idée de ma tête,
parce qu’en 16 ans, mes parents m’auraient dit quelque chose.


Là, Auralie, elle rentre chez elle. On a passé la journée au
Luxembourg et on a pique-niqué sur la pelouse interdite. Mais Auralie
n’était pas de très bonne humeur et on a pas beaucoup parlé. On
mangeait nos sandwhiches en silence, remarquant de temps en temps le
bassin avec les bateaux et les canards. Et le retour en bus n’est pas
très joyeux non plus.


Une dame d’une trentaine d’années me regarde fixement, me mettant
plutôt mal à l’aise. Je détourne mon regard, et je me concentre sur le
conducteur qui a l’air épuisé. Je sens qu'elle m'observe toujours. Je
mets ma capuche pour qu'elle ne puisse pas bien me voir.  Sous ma
capuche, je peux la voir discrètement. Elle tourne sa tête. Auralie la
regarde aussi. Elle me dit les premiers mots de tout ce voyage.


"Hé, Julien... cette dame... elle te ressemble un p'tit peu, tu trouves pas?"


Après m'avoir dit cela, je me dis que tout est normal entre nous deux
encore une fois, mais j'ai tort. Je regarde, mais elle m'ignore.



CHAPITRE 4:


VALÉRIE

Je monte dans le bus 24 car je n'ai pas assez de sous avec moi pour
prendre un taxi. Je rentre dans le bus avec mon sac à main noir, qui
va avec mon habit noir. Le conducteur me regarde une seconde. Juste le
temps de lui dire:


"Bonjour Monsieur."


Je sort ma carte de bus, et je paye.  Je suis en route pour aller au
tribunal car je n'ai pas payé mon amende à temps. C'est un cas
vraiment débile. J'ai passé un feu jaune et juste quand j'étais au
milieu du carrefour, le feu changea à la couleur rouge.  Je trouvais
que ce n'était pas juste! Je n'aurais pas dû être arrêtée par ce
policier!  Je suis révoltée.  Je ne comprends pas pourquoi les
policiers sont si précis.  Je n’ai rien fait de mal!  Maintenant il
faut que je me présente devant le juge, au lieu d’aller au travail et
faire mon boulot.




Ma longue robe s’accroche à un siège du bus, et il me faut quelques
minutes pour la décrocher.



Je dois enlever une paillette de la robe noire, et je vais m’asseoir
sur un siège au fond du bus. Je vérifie que ma robe n’est pas
déchirée. Sinon, il va falloir que j’en rachète une autre. C’est la
seule robe noire que j’ai, et  comme je ne porte que du noir et que
c’est l’été, j’aimerais qu’elle dure plus longtemps que la dernière.
Ça a peut-être l’air bizarre, mais depuis que mon père  est mort il y
a trois ans, je ne porte pas de couleur pour le deuil. Certains
pourraient penser que c’est complètement démodé cette notion de deuil
et de noir, et que c’était que les vieilles grand-mères qui perdaient
leur mari il y a cent ans. Mais je pense que c’est une bonne facon de
présenter mes respects à mon père, que j’aimais énormément et de qui
j’étais vraiment proche. Même si c’était il y a trois ans, je m’en
souviens encore. Les coups de fil des docteurs à propos de l’accident
de wagon, la dépression de ma mère pendant un an, et tout cela était
encore frais dans mon esprit. Ce n’était vraiment pas facile. En tout
cas, je m’habille en noir en sa mémoire.



Je réalise que je suis tellement dans mes pensées que j’ai râté mon
stop.  J’entends un homme demander une question au conducteur.


“Monsieur?  Monsieur?  Vous savez où est le stop du tribunal de Grande Instance?


-Désolé, Monsieur, nous venons de le passer.  Vous feriez mieux de
vous arrêter au prochain arrêt.”


J’écoute l’homme qui râle et je réalise que je commence à marcher vers
lui, dans sa direction.  Je vois ma main toucher son épaule, et je
sens que ma bouche veux lui dire quelque chose.


“Vous allez au tribunal? Ah? Moi aussi!

-Vous savez où c’est? Vous pouvez peut-être me guider?

-Oui, bien-sûr!”


Le prochain arrêt arrive, et nous sortons ensemble.

CHAPITRE 5:


FRANÇOIS


Je monte dans le bus 22 pour la première fois.  J’ai peur d'avoir pris
le mauvais bus et d'être en retard pour mon premier entretien.  Ma
femme et moi, nous venons de déménager à Paris.  En montant dans le
bus, je bute sur la marche.  Je me rends compte que je n’ai pas de
ticket donc je demande au conducteur où je pourrais en trouver.  Je
sors du bus et je me dirige à la bouche de métro la plus proche. Dès
que je suis arrivé, je fouille dans mes poches pour mon argent et je
ne trouve que des billets alors que j’ai seulement besoin de l’argent
pour un trajet. J’achète un ticket avec 20 euros dessus car je n’ai
pas la monnaie exacte.  En revenant, je trouve le bus 24.  Le
conducteur me regarde comme si j’étais vraiment fou.



Je sort mon ticket et tous mes autres dessous  tombent avec.  Ces
jours-ci, je suis tellement mal-organisé depuis qu'on a entendu que ma
femme avait une maladie qui s’appelle l’Alzheimer.  L’amour de ma vie
va bientôt m’oublier.  Nous sommes venus à Paris pour qu’elle puisse
être soignée.  Ma vie s’est vraiment retournée.


Après deux arrêts de bus je monte voir le conducteur pour lui demander
où est le tribunal de Grande Instance.  Je viens de déménager de
l’Italie où j’étais avocat. Cet entretien est très important pour moi,
donc quand il me dit que j'ai râté mon arrêt, je stresse.  Une
gentille dame vient me voir, elle me dit qu'elle a entendu ma
conversation avec le conducteur et qu'elle veut bien m'aider à trouver
le tribunal.  Par hasard, elle aussi a râté son arrêt, et elle va au
même endroit que moi.


En attendant le prochain arrêt, nous parlons.  Je sens que cette dame
serait ma première amie à Paris.  Nous sortons du bus, en conversant.

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